Evolution des politiques publiques en addictologie

Séminaire du 7 octobre 2024

par Jean-Pierre Couteron, Psychologue clinicien

 

Jean-Pierre Couteron, psychologue clinicien, présente l’historique et le fonctionnement des Consultations Jeunes Consommateurs (CJC), un dispositif créé pour aborder les problèmes de consommation chez les jeunes.

Dans les années 2000, face à l’augmentation de la consommation de cannabis chez les adolescents, les professionnels ont constaté un besoin d’adapter leur approche. Le concept de “seuil adapté” a émergé, permettant de rencontrer les usagers sans exiger d’emblée l’abstinence ou une demande de psychothérapie.

Les CJC ont été conçues comme un dispositif d’intervention précoce, différent des consultations traditionnelles. Malgré le terme “consultation” imposé pour des raisons de financement par l’assurance maladie, l’approche se veut moins médicalisée et plus accessible. L’acronyme “CJC” a d’ailleurs été privilégié pour atténuer cette connotation médicale.

Le principe fondamental des CJC est d’aborder les consommations comme des “solutions adaptatives” que les jeunes ont trouvées à leurs problèmes. Les intervenants adoptent une posture non jugeante et motivationnelle, discutant avec les jeunes des bénéfices et inconvénients de leurs usages, sans exiger immédiatement l’arrêt.

Un défi majeur est de négocier avec l’entourage (parents, école, justice) qui souhaite souvent que le jeune arrête immédiatement sa consommation. Le professionnel doit se positionner différemment, comme accompagnateur plutôt que comme figure d’autorité.

Les CJC respectent la temporalité des jeunes. Certains reviennent des années plus tard pour aborder des problèmes plus profonds (traumatismes, troubles identitaires) qu’ils n’étaient pas prêts à traiter initialement.

Le dispositif a évolué pour s’adapter aux nouvelles pratiques: d’abord centré sur le cannabis, il aborde maintenant l’alcool (binge drinking), les écrans, les paris sportifs et d’autres comportements problématiques.

Couteron exprime des inquiétudes quant à l’avenir des CJC face à deux tendances: une approche plus punitive envers les usagers et une tentation de transformer ces consultations en psychothérapies classiques, perdant ainsi leur spécificité d’aller au contact des jeunes qui n’ont pas de demande claire d’aide.

La force des CJC réside dans leur capacité à s’adapter aux nouveaux objets de consommation et à maintenir une approche centrée sur la rencontre et l’accompagnement plutôt que sur le soin imposé.